Staff Benda Bilili (2)

Rédigé par Mohikkan | Classé dans : À lire, écouter, voir

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Ce petit billet fait suite au précédent. Je ne fais que copier-coller ici le texte d'introduction de l'émission " Nous autres " animée par Zoé Varier sur France Inter.


Si vous voulez écouter ou podcaster cette émission intéressante et optimiste, vous trouverez le lien de son émission ici.

"A l’occasion de la tournée des Benda Bilili en France, retour à Kinshasa pour une répétition avec les musiciens dans le zoo de la ville.

Cette émission a été diffusée pour la première fois, le 24 Avril 2009.

Kinshasa est une ville sans eau, sans électricité, une ville sans route, sans transports, une ville où il n'y a plus de livres dans les bibliothèques, plus de médicaments dans les hôpitaux, plus d'œuvres dans les musées, plus d'animaux dans le zoo. Une ville où les enfants ne vont plus à l'école

Kinshasa est une ville qui se délabre, qui se délite, qui s'effrite. Ruinée, déglinguée, Kin se déconstruit inexorablement, disparaît petit à petit.

Dans cette ville sale, boueuse, couverte d'ordures, aux égoûts à ciel ouvert, dans ce décor infernal et chaotique, les Kinois résistent et refusent de lâcher prise. Ici chacun se débrouille à sa façon pour survivre. A Kin tout s'achète, se vend et se revend, tout se monnaye. Les enseignants ne sont plus payés depuis des années, alors pour survivre, ils exigent de l'argent auprès des parents des élèves pour dispenser leur savoir, les médecins font pareil, il faut payer pour être soigné, sinon vous mourez.

A Kinshasa tout le monde extorque tout le monde. Les fonctionnaires aux salaires insuffisants monnayent leurs services, les policiers rackettent les automobilistes. Les employés du service public ont privatisé leur emploi en quelque sorte, c'est le seul moyen d'obtenir de quoi vivre, et celui qui ne se livre pas à ce sport est déjà mort.

C'est comme ça que l'on s'en sort à Kinshasa, au jour le jour, demain n'existe pas.

Misérable, infernale, abandonnée à elle même, Kinshasa a aussi parfois des allures de fiction, de ville imaginaire où chacun travaille tout en sachant que son emploi n'existe plus, comme cette employée de la Poste qui n'est plus payée depuis des années, elle continue à se rendre à son travail contre tout réalisme. Elle vient à la Poste parce que c'est une manière d'espérer, une façon de résister au désespoir, et de se convaincre qu'un jour le travail renaîtra.

C'est ce que croient aussi les musiciens du Staff Benda Bilili, ils sont mendiants, vendeurs à la sauvette, ils sont tous handicapés, polios, ils sont des crèves la faim et ils chantent divinement bien, ils chantent leur vie de misère, la richesse du Congo, ils chantent l'espoir et la nécessité de lutter pour que le pays renaisse de ses cendres."

Mots clés : misèreexempleoptimisme